Le 3 décembre prochain, le peuple vénézuélien va choisir de poursuivre ou non le processus révolutionnaire initié par Hugo Chavez voilà maintenant huit ans. Face à lui, se présente Manuel Rosales, impliqué dans le coup d’État de 2002.
Au soir du 3 décembre, il n’y aura certainement pas de surprise. L’engouement populaire dont bénéficie Hugo Chavez est tel qu’on ne voit pas comment il pourrait perdre cette élection présidentielle. Depuis 1998, date de son accession au pouvoir, Chavez et ses partisans ont gagné les onze élections. Certes, à plusieurs reprises, les taux de participation étaient catastrophiques - entre 25 et 30 % - mais, à chaque fois que l’enjeu tournait autour de la pérennité du candidat président (élection présidentielle, référendum révocatoire), les Vénézuéliens ont toujours répondu massivement en faveur de Chavez, avec près de 60 % des voix et de forts taux de participation.
La réussite des missions d’éducation ou de santé est telle que le soutien populaire dont bénéficie Chavez n’est pas près de disparaître. Pourtant, la victoire annoncée risque de se faire dans la douleur. L’opposition se sait battue, tous les sondages donnant Chavez gagnant avec plus de vingt points d’écart sur son principal opposant, Manuel Rosales. Pour les opposants, l’objectif est donc d’expliquer que les élections sont jouées, les chavistes étant accusés de manipuler les urnes.
La bataille est donc avant tout médiatique. De faux instituts de sondages, financés par les États-Unis, publient des enquêtes donnant Rosales gagnant. Quoi de plus simple, ensuite, que de dénoncer la fraude électorale, par l’intermédiaire de l’ONG Sumate qui est, en fait, une officine de la CIA. L’ensemble des opposants à Chavez s’est rallié à Rosales : des anciens partis comme le Copei (social-chrétien) à l’organisation issue d’une branche maoïsante de la guérilla vénézuélienne, Bandera Roja, jusqu’aux fascistes de Primera Justicia. Rosales est le gouverneur de l’État de Zulia, le plus riche du Venezuela, frontalier de la Colombie. Ses liens avec le président colombien, Alvaro Uribe, et les paramilitaires sont avérés. Il compte, dans ses rangs, un certain nombre de gros bras soupçonnés d’être impliqués dans des assassinats de paysans qui revendiquaient l’application de la loi sur la terre.
De son côté, la gauche la plus radicale du Venezuela exprime, de plus en plus, des critiques sur le processus politique en cours. Le Mouvement du 13 avril, le Front paysan Ezequiel Zamora, le projet Notre Amérique, les camarades du Parti de la révolution et du socialisme, qui animent la tendance classiste au sein de l’Union nationale des travailleurs (UNT), Orlando Chirino et Stalin Pérez, pointent les manques. Durant cette campagne, ils se sont regroupés autour du slogan « Pour toutes nos luttes », marquant ainsi que, bien qu’étant des soutiens à la campagne de Chavez, ils entendaient voter, au-delà de la personnalisation de l’élection, pour la continuité et l’accélération du « processus révolutionnaire bolivarien ». Veillant à ce qu’une nouvelle bureaucratie chaviste ne vienne pas s’installer en lieu et place de la bureaucratie existante, ils veulent que l’axe programmatique principal de Chavez durant ces élections, « Construire le socialisme du xxie siècle », ne soit pas qu’un slogan de campagne.
La véritable campagne risque, en fait, de commencer après le 3 décembre. Nul doute que Chavez devra faire face à un battage médiatique sans précédent, alimenté par les États-Unis, relayé au-delà des frontières vénézuéliennes par les médias classiques comme, en France, Le Monde ou Libération, et dont le but sera simple : faire croire que le Venezuela est devenu une dictature. Mais si Chavez gagne cette partie-là, il devra ensuite se tourner vers cette gauche radicale et populaire qui, jusqu’à présent, lui a été un d’un indéfectible soutien, et qui attend aujourd’hui que l’avancée vers le socialisme se traduise par des actes économiques et politiques concrets.
Yannick Lacoste
Publié dans: rouge
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire